Friday, October 17, 2008

Edvirsp, nouvel Edvige qui ne convainc pas

Edvirsp, nouvel Edvige qui ne convainc pas

GAËL COGNÉ, Libération 17 octobre 2008

Le collectif Non à Edvige ! n’en démord pas. Selon ses représentants, le successeur d’Edvige, Edvirsp (Exploitation documentaire et valorisation de l’information relative à la sécurité publique) ne serait jamais que la nouvelle version édulcorée d’un même fichier. Une soixantaine de manifestations se sont tenues, hier, jour de la sainte Edwige, partout en France, la majorité devant des préfectures pour déposer une fausse fiche Edvirsp.
Où en est-on avec ces fichiers ?

Le projet de décret qui doit instituer Edvirsp est en cours d’examen à la Cnil, la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Elle doit émettre un avis (probablement fin octobre ou début novembre) mais il n’est que consultatif. D’ores et déjà, Alex Türk, son président, s’était déclaré plutôt satisfait des changements. Le texte doit ensuite passer rapidement devant le Conseil d’Etat. Le décret devrait pouvoir être publié au Journal officiel d’ici à la fin de l’année si le gouvernement le souhaite. En réaction, le collectif «envisage» d’organiser, «début 2009, des états généraux sur les fichiers ou les libertés publiques», annonce Jean-Claude Vitran, de la Ligue des droits de l’homme (LDH).

La députée (PS) Delphine Batho a, quant à elle, demandé une nouvelle fois, hier, la tenue d’un «débat parlementaire débouchant sur une loi» pour encadrer les fichiers de renseignements.
Que change Edvirsp à Edvige ?

Principale évolution, «la vie sexuelle et l’état de santé» ont été exclus du fichier, explique Philippe Castel (Fédération syndicale unitaire, FSU). C’est le point qui avait fait bondir les associations gays et lesbiennes, notamment. Par ailleurs, les demandes de consultations des fiches seront mieux encadrées. Pendant deux ans, on pourra savoir quel agent est venu consulter un dossier. Ensuite, le fichier des personnalités a disparu au profit d’un répertoire administratif tenu par les préfets de région et réduit à la portion congrue. Pour finir, un «droit à l’oubli» a été introduit pour les mineurs de 13 ans et plus. Les données seront effacées au-delà de 18 ans, sauf «si un élément nouveau» intervient dans les deux ans avant la majorité. Auquel cas, on attend 21 ans.
Qu’est-ce qui pose toujours problème ?

Le fichage des mineurs, précisément. C’était l’un des éléments qui avait catalysé la contestation. «On se souvient que Nicolas Sarkozy voulait ficher les enfants dès 3 ans. Qu’est-ce qui va se passer ? Dans deux ans, on fichera à 6 ans ?» s’interroge Jean-Claude Vitran (LDH). Autre intransigeance, on pourrait ficher les «origines raciales ou ethniques». Enfin, la notion de «susceptible de troubler l’ordre public» a été supprimée et remplacée par «les personnes [pouvant] porter atteinte à la sécurité intérieure». Une petite concession sémantique. D’une manière générale, à l’image de Philippe Castel (FSU), le collectif a le sentiment qu’«on prend 25 claques au lieu de 30.»