Thursday, August 02, 2007

Un rapport du Conseil de l'Europe accable la France

Justice, prison, immigration : un rapport du Conseil de l'Europe accable la France
LEMONDE.FR : Article publié le 12.02.06


Dans un rapport à paraître mercredi, le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe porte un regard très critique sur "sur le respect effectif des droits de l'homme en France".


La France, pays des droits de l'homme. Voici une image qu'un rapport à paraître du Conseil de l'Europe va plus qu'écorner. Signé du commissaire aux droits de l'homme, Alvaro Gil-Robles, et issu notamment de la visite de sept prisons et de cinq commissariats de police, ce document de près de 200 pages, assorti d'une cinquantaine de recommandations, porte un regard très critique "sur le respect effectif des droits de l'homme en France".


En écho aux critiques ravivées par l'affaire d'Outreau, le rapport de M. Gil-Robles est accablant sur le "le manque criant des moyens de la justice française" : surcharge de travail, manque chronique de greffiers, problèmes de sécurité ou bien encore vétusté des locaux dont certains donnent "l'impression d'appartenir à un autre temps".

Le commissaire européen se dit aussi "choqué par l'état lamentable" des cellules dans certains commissariats où "les gardés à vue dorment à même le sol, aucun matelas, aucun linge ne leur étant fournis".

Il estime également que la présence de l'avocat pendant la garde à vue est plus "formelle qu'active", et condamne les nombreuses restrictions faites à l'exercice du travail d'avocat qui découlent de la loi elle-mêmen en particulier pendant les périodes de garde à vue. "Toute société démocratique n'a rien à redouter de la présence d'avocats responsables (...) lors de la garde à vue", souligne le commissaire.

"UNE PRATIQUE CHOQUANTE"


Sur les prisons, M. Gil-Robles dresse "un douloureux constat" en raison d'une "surpopulation chronique" qui "prive un grand nombre de détenus de l'exercice de leurs droits élémentaires", et juge "tout à fait excessive" la durée du placement au "mitard", qui peut aller jusqu'à 45 jours. Pour les mineurs délinquants, le rapport approuve la création des "centres éducatifs fermés" mais dénonce l'incarcération en prison, facteur notamment de récidive. Le rapport est très sévère à l'égard des policiers, chez qui domine un "sentiment d'impunité". D'où une hausse du nombre de plaintes pour brutalités de 34 % entre 2003 et 2004.


Enfin le commissaire européen est très critique sur la politique d'immigration de la France. "Le fait d'énoncer des quotas est une pratique choquante", estime M. Gil-Robles en évoquant la volonté affichée du gouvernement d'augmenter de 50 % en 2005 les expulsions d'étrangers en situation irrégulière.

"INDIGNE DE LA FRANCE"



Le rapport dénonce aussi "la pénalisation" des étrangers en France due au "durcissement des politiques d'immigration". Alors que le gouvernement français vient d'approuver un avant-projet de loi sur une "immigration choisie", le commissaire européen condamne une évolution qui peut "mener à une stigmatisation des demandeurs d'asile, soupçonnés d'être des immigrés économiques".

Quant aux zones d'attente, M. Gil-Robles se demande si "l'étranger [y] jouit réellement de la possibilité de déposer une demande d'asile", critiquant le recours obligatoire à la langue française pour remplir les formulaires, et plus généralement l'impossibilité à faire valoir ses droits. "Ces lieux semblent être considérés comme ne faisant pas partie du territoire français", avance-t-il. Des policiers "se jouent de la méconnaissance des lois" des étrangers notamment "pour refuser d'enregistrer certaines demandes". Sur les centres de rétention administrative (CRA), où sont placés les étrangers dont l'expulsion n'a pu être immédiate, les conditions varient selon lui d'un centre à un autre. Celui situé dans le palais de justice de Paris est "catastrophique et indigne de la France", note le rapport, qui épingle aussi celui d'Arenc, près de Marseille.


Avec AFP