Repères
Le projet de normes des Nations Unies sur la responsabilité des transnationales en matière de droits humains
61ème session de la CDH NU du 14 mars au 22 avril 2005
samedi 5 mars 2005.
La Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies, à l’occasion de sa 61ème session à Genève du 14 au 22 avril 2005 aura à statuer sur un projet de normes des Nations Unies sur la responsabilité des transnationales en matière de droits humains. Ce projet de normes constitue une réelle avancée parce qu’il offre une revue complète des obligations auxquelles sont déjà soumises les entreprises transnationales et qu’il les universalise. Des améliorations du projet sont d’ores et déjà souhaitables.
Le projet de Normes sur les responsabilités des sociétés transnationales et autres entreprises en matière de droits humains a été adopté par la sous Commission des Nations Unies pour les Droits de l’homme en 2003. Pour qu’il soit adopté par les Nations Unies il faut encore qu’il soit approuvé par la Commission des Nations Unies pour les droits de l’Homme elle-même, puis par le Conseil Economique et Social (ECOSOC) des Nations Unies.
Le projet de normes : une avancée réelle
Le projet de Normes ne crée pas de nouvelles obligations, mais offre une revue complète des obligations auxquelles sont déjà soumises les entreprises selon les Traités et Conventions onusiens existants, et détaille concrètement ce que signifient ces obligations pour les entreprises. En l’état actuel, les normes ne sont pas plus contraignantes que les initiatives existantes dans leur périmètre respectif. Les articles 17 et 18 des Normes précisent toutefois déjà que « les Etats mettent en place et renforcent le cadre juridique et administratif nécessaire pour assurer l’application par les sociétés transnationales et autres entreprises des Normes et autres textes nationaux et internationaux pertinents », et que « s’agissant de fixer des dommages intérêts ou d’imposer des sanctions pénales, et à tous autres égards, les tribunaux nationaux et/ou internationaux font application des présentes Normes ».
Les Normes présentent les caractéristiques suivantes :
Elles soulignent l’indivisibilité de tous les droits humains ;
Elles s’appliquent à TOUTES les entreprises, procurant une trame commune parmi les multiples codes de conduite existants ;
Elles se fondent uniquement sur le droit international existant et reconnaissent donc l’existence d’une communauté internationale fondée sur le droit, dont l’Etat est l’unité de base : les Normes reconnaissent la responsabilité première des Etats en matière de respect, protection, promotion et mise en œuvre des droits humains ;
Elles rappellent que les sociétés transnationales ont des obligations en matière de respect des droits humains et de la souveraineté nationale des Etats, et cela partout dans le monde.
Enfin, les normes prévoient que les entreprises doivent intégrer les normes aux « contrats et accords conclus avec des tiers », ce qui tend à établir la responsabilité solidaire des sociétés transnationales avec leurs fournisseurs, sous-traitants et preneurs de licence. Il importe en effet que les sociétés transnationales soient tenues pour responsables sur l’ensemble du processus de production, de distribution et de commercialisation qu’elles dirigent.
Des améliorations sont souhaitables, dès maintenant
Au moins deux types d’amélioration au projet de Normes sont d’ores et déjà souhaitables :
1ère piste d’amélioration : Créer des mécanismes contraignants de mise en œuvre et d’application des Normes. Ils sont certes évoqués par le texte, mais de façon vague. Or c’est l’élément clé si l’on veut que les Normes constituent une avancée significative. Il serait nécessaire de prévoir la mise sur pied d’un tribunal qui puisse juger les entreprises pour violations des droits humains, ou bien la possibilité de les juger dans le cadre de tribunaux internationaux existants.
2ème piste d’amélioration : le texte des Normes devrait prévoir le principe de la responsabilité civile et pénale des dirigeants des sociétés transnationales pour les violations commises par les entreprises qu’ils dirigent. Sinon, en cas de sanctions, elles risquent de ne viser surtout que les exécutants, cadres subalternes ou travailleurs.
En outre, si le texte suggère la responsabilité solidaire des sociétés transnationales avec leurs fournisseurs, sous-traitants et preneurs de licence, il pourrait être renforcé sur ce point. Ainsi, les sociétés transnationales devraient être tenues pour responsables du respect des Normes sur l’ensemble du processus de production, de distribution et de commercialisation qu’elles dirigent. L’ONU doit notamment pousser les Etats à adopter des législations qui rendent les sociétés transnationales légalement responsables, dans leur propre pays (celui où est basé leur siège), pour des violations de droits humains commises par elles ou leurs sous traitants ailleurs.
Le projet de normes est exposé au risque d’un enterrement lors de la 61ème session de la CDH NU
Aujourd’hui, la tendance serait plutôt à l’édulcoration sinon à l’enterrement du projet. Si, en avril 2004, la Commission des droits de l’Homme des Nations Unies avait maintenu sur son agenda ce projet de Normes, elle ne s’était pour autant pas prononcée directement sur le texte. Elle s’était simplement engagée alors à discuter lors de sa 61ème session de mars-avril 2005 des possibilités de renforcer et mettre en œuvre les différents standards existant en matière de responsabilité des entreprises. La Commission des Nations Unies avait alors tenu à minimiser la portée du projet de Normes de la Sous commission en soulignant, toujours en avril 2004, que ces Normes n’ont « aucune valeur juridique », ceci avant même que n’ait été élaboré le rapport du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme sur ce sujet qui doit lui être soumis en mars 2005. Par ailleurs ce rapport du Haut Commissariat doit définir « la portée et le statut juridique » non seulement des Normes de la Sous-commission, mais de toutes les « initiatives et normes existantes » sur la responsabilité des entreprises en matière de droits humains. Il y a là un risque de dilution des Normes parmi d’autres standards, pour éviter de se prononcer spécifiquement sur ce texte. Il semble que les gouvernements des Etats-Membres de l’Union Européenne se soient accordés pour recommander à la CDH NU d’inscrire le projet de normes dans un cadre plus global concernant la responsabilité des transnationales. Une telle recommandation ne peut manquer de repousser encore la perspective de voir le projet de Normes enfin adopté. Dans le même temps, le Parlement Européen, de son côté, a exprimé son soutien à l’adoption du projet de Normes.
Le projet de normes des Nations Unies sur la responsabilité des transnationales en matière de droits humains
61ème session de la CDH NU du 14 mars au 22 avril 2005
samedi 5 mars 2005.
La Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies, à l’occasion de sa 61ème session à Genève du 14 au 22 avril 2005 aura à statuer sur un projet de normes des Nations Unies sur la responsabilité des transnationales en matière de droits humains. Ce projet de normes constitue une réelle avancée parce qu’il offre une revue complète des obligations auxquelles sont déjà soumises les entreprises transnationales et qu’il les universalise. Des améliorations du projet sont d’ores et déjà souhaitables.
Le projet de Normes sur les responsabilités des sociétés transnationales et autres entreprises en matière de droits humains a été adopté par la sous Commission des Nations Unies pour les Droits de l’homme en 2003. Pour qu’il soit adopté par les Nations Unies il faut encore qu’il soit approuvé par la Commission des Nations Unies pour les droits de l’Homme elle-même, puis par le Conseil Economique et Social (ECOSOC) des Nations Unies.
Le projet de normes : une avancée réelle
Le projet de Normes ne crée pas de nouvelles obligations, mais offre une revue complète des obligations auxquelles sont déjà soumises les entreprises selon les Traités et Conventions onusiens existants, et détaille concrètement ce que signifient ces obligations pour les entreprises. En l’état actuel, les normes ne sont pas plus contraignantes que les initiatives existantes dans leur périmètre respectif. Les articles 17 et 18 des Normes précisent toutefois déjà que « les Etats mettent en place et renforcent le cadre juridique et administratif nécessaire pour assurer l’application par les sociétés transnationales et autres entreprises des Normes et autres textes nationaux et internationaux pertinents », et que « s’agissant de fixer des dommages intérêts ou d’imposer des sanctions pénales, et à tous autres égards, les tribunaux nationaux et/ou internationaux font application des présentes Normes ».
Les Normes présentent les caractéristiques suivantes :
Elles soulignent l’indivisibilité de tous les droits humains ;
Elles s’appliquent à TOUTES les entreprises, procurant une trame commune parmi les multiples codes de conduite existants ;
Elles se fondent uniquement sur le droit international existant et reconnaissent donc l’existence d’une communauté internationale fondée sur le droit, dont l’Etat est l’unité de base : les Normes reconnaissent la responsabilité première des Etats en matière de respect, protection, promotion et mise en œuvre des droits humains ;
Elles rappellent que les sociétés transnationales ont des obligations en matière de respect des droits humains et de la souveraineté nationale des Etats, et cela partout dans le monde.
Enfin, les normes prévoient que les entreprises doivent intégrer les normes aux « contrats et accords conclus avec des tiers », ce qui tend à établir la responsabilité solidaire des sociétés transnationales avec leurs fournisseurs, sous-traitants et preneurs de licence. Il importe en effet que les sociétés transnationales soient tenues pour responsables sur l’ensemble du processus de production, de distribution et de commercialisation qu’elles dirigent.
Des améliorations sont souhaitables, dès maintenant
Au moins deux types d’amélioration au projet de Normes sont d’ores et déjà souhaitables :
1ère piste d’amélioration : Créer des mécanismes contraignants de mise en œuvre et d’application des Normes. Ils sont certes évoqués par le texte, mais de façon vague. Or c’est l’élément clé si l’on veut que les Normes constituent une avancée significative. Il serait nécessaire de prévoir la mise sur pied d’un tribunal qui puisse juger les entreprises pour violations des droits humains, ou bien la possibilité de les juger dans le cadre de tribunaux internationaux existants.
2ème piste d’amélioration : le texte des Normes devrait prévoir le principe de la responsabilité civile et pénale des dirigeants des sociétés transnationales pour les violations commises par les entreprises qu’ils dirigent. Sinon, en cas de sanctions, elles risquent de ne viser surtout que les exécutants, cadres subalternes ou travailleurs.
En outre, si le texte suggère la responsabilité solidaire des sociétés transnationales avec leurs fournisseurs, sous-traitants et preneurs de licence, il pourrait être renforcé sur ce point. Ainsi, les sociétés transnationales devraient être tenues pour responsables du respect des Normes sur l’ensemble du processus de production, de distribution et de commercialisation qu’elles dirigent. L’ONU doit notamment pousser les Etats à adopter des législations qui rendent les sociétés transnationales légalement responsables, dans leur propre pays (celui où est basé leur siège), pour des violations de droits humains commises par elles ou leurs sous traitants ailleurs.
Le projet de normes est exposé au risque d’un enterrement lors de la 61ème session de la CDH NU
Aujourd’hui, la tendance serait plutôt à l’édulcoration sinon à l’enterrement du projet. Si, en avril 2004, la Commission des droits de l’Homme des Nations Unies avait maintenu sur son agenda ce projet de Normes, elle ne s’était pour autant pas prononcée directement sur le texte. Elle s’était simplement engagée alors à discuter lors de sa 61ème session de mars-avril 2005 des possibilités de renforcer et mettre en œuvre les différents standards existant en matière de responsabilité des entreprises. La Commission des Nations Unies avait alors tenu à minimiser la portée du projet de Normes de la Sous commission en soulignant, toujours en avril 2004, que ces Normes n’ont « aucune valeur juridique », ceci avant même que n’ait été élaboré le rapport du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme sur ce sujet qui doit lui être soumis en mars 2005. Par ailleurs ce rapport du Haut Commissariat doit définir « la portée et le statut juridique » non seulement des Normes de la Sous-commission, mais de toutes les « initiatives et normes existantes » sur la responsabilité des entreprises en matière de droits humains. Il y a là un risque de dilution des Normes parmi d’autres standards, pour éviter de se prononcer spécifiquement sur ce texte. Il semble que les gouvernements des Etats-Membres de l’Union Européenne se soient accordés pour recommander à la CDH NU d’inscrire le projet de normes dans un cadre plus global concernant la responsabilité des transnationales. Une telle recommandation ne peut manquer de repousser encore la perspective de voir le projet de Normes enfin adopté. Dans le même temps, le Parlement Européen, de son côté, a exprimé son soutien à l’adoption du projet de Normes.
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